Annoncé par le Premier Ministre jeudi soir, le Parlement vient d’adopter définitivement le report de la séance d’installation, qui devait se tenir entre le 20 et le 22 mars 2020, pour les communes dont les conseillers municipaux ont été élus au complet lors du premier tour de scrutin, le 15 mars dernier.
Cette séance est reportée à une date qui sera fixée par décret au plus tard au mois de juin, aussitôt que la situation sanitaire le permet au regard de l’analyse du comité national scientifique.
Pour les séances d’installation qui ont pu avoir lieu entre le 20 et le 22 mars 2020, le législateur ne remet pas en cause, comme initialement envisagé, la légalité des décisions adoptées lors de celle-ci, mais en reporte la prise d’effet à la date fixée par le décret précité.
Jusqu’à cette date, le mandat des conseillers municipaux sortants est prorogé.
Le premier tour de scrutin du 15 mars 2020 a permis de procéder à l’élection au complet des conseils municipaux dans 30 143 communes.
L’application des règles de droit commun imposait à ces communes de tenir leur séance d’installation entre le 20 et le 22 mars 2020, afin notamment d’élire le Maire et ses adjoints. En effet, l’article L.2121-7 du CGCT prévoit que, lors du renouvellement général des conseillers municipaux, la séance d’installation du conseil municipal se tient au plus tôt le vendredi et au plus tard le dimanche suivant le tour de scrutin à l’issu duquel le conseil a été élu au complet.
Les services de l’Etat n’avaient pas manqué de rappeler une telle obligation en précisant : « (…) le premier tour des élections municipales du 15 mars a permis le renouvellement intégral de plus de 30 000 conseils municipaux. Dans ces conseils municipaux, et seulement ceux-ci, il est désormais nécessaire de procéder à l’élection du maire et des adjoints aux maires entre le 20 et le 22 mars conformément à l’article L.2121-7 du CGCT. La date la plus proche sera à prioriser. » (Circulaire du 17 mars 2020 sur l’élection des conseillers municipaux et communautaires et des exécutifs et fonctionnement des organes délibérants).
Toutefois, la situation pandémique ne faisant que s’aggraver en France, le nombre de personnes contaminées par le COVID-19 augmentant de jour en jour, était-il raisonnable de maintenir la tenue de cette séance d’installation, dans de tels délais ?
Le comité national scientifique recommandant d’éviter toute réunion des conseils municipaux au vu de la progression de l’épidémie de Covid‑19, le Premier Ministre annonçait le 19 mars 2020, devant le Sénat, la nécessité d’ajourner la tenue des séances d’installation fixées entre le 20 et le 22 mars 2020.
L’adoption d’une loi s’avérant nécessaire pour y procéder, le Sénat, dans sa grande sagesse, décidait du report de cette séance d’installation (Projet de loi n°76 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid -19 adopté le 19 mars 2020 par le Sénat).
L’Assemblée Nationale confirmait cette mesure. A l’initiative du Gouvernement, était également adoptée une mesure rétroactive afin de rendre sans effet les décisions adoptées lors de séances d’installation qui se seraient tenues entre le 20 et le 22 mars 2020 (Projet de loi n°412 adopté par l’Assemblée Nationale le 21 mars 2020).
Finalement, en commission mixte paritaire, la solution de compromis suivante vient d’être adoptée, tant par le Sénat, que l’Assemblée Nationale.
- L’entrée en fonction des conseillers municipaux, élus au complet le 15 mars 2020, est repoussée à une date fixée par décret au plus tard au mois de juin, aussitôt que la situation sanitaire le permet au regard de l’analyse du comité national scientifique. La loi leur confère un statut de « candidat élu au premier tour » dont l’entrée en fonction est différée. Jusqu’à leur entrée en fonction, ils ne disposent ni des droits, ni des obligations normalement attachées à leur mandat. Le régime des incompatibilités ne leur sera donc applicable qu’à compter de la date fixée par le décret précité.
- La séance d’installation se tiendra de plein droit au plus tôt cinq jours et au plus tard dix jours après cette date.
- Pour les communes qui auraient tenue leur séance d’installation entre le 20 et le 22 mars 2020, les désignations et les délibérations régulièrement adoptées lors de cette séance ne prendront effet qu’à compter de la date fixée par le décret précité. Les nouveaux Maires et adjoints, élus lors de cette séance, n’entreront donc en fonction qu’à cette date.
- Le mandat des conseillers municipaux sortants (dont le mandat a pris fin le 15 mars 2020) est prorogé jusqu’à l’entrée en fonction des candidats élus au 1er tour de scrutin, soit jusqu’à la date qui sera précisée par décret. Pendant cette période, la vacance des sièges de conseillers municipaux ne pourra pas donner lieu à des élections partielles. Leurs pouvoirs seront, à notre sens, limités à la gestion des seules affaires courantes et urgentes. Néanmoins, en cette période de crise, « la théorie des circonstances exceptionnelles » pourrait légalement fonder la prise de décisions n’entrant pas dans le champs d’application des affaires courantes et urgentes. Par ailleurs, leurs successeurs n’étant pas installés, le mandat des Maires et des adjoints sortants sera maintenu jusqu’à la tenue de cette séance d’installation ajournée (article L.2122-15 du CGCT). Leurs pouvoirs seront également limités à la gestion des seules affaires courantes et urgentes.
Afin d’apprécier la possibilité de tenir une telle séance d’installation, le rapport, qui devra être remis au Parlement au plus tard le 23 mai 2020, devra examiner les risques sanitaires et les précautions à prendre pour l’élection du maire et des adjoints dans ces communes.
Il s’agit ici, d’une première analyse rapide d’une des mesures de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.
Nous exposerons l’ensemble des dispositions électorales de cette loi de manière plus approfondie dans le cadre d’un article à paraître prochainement dans la Gazette des Communes. A suivre donc…
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